Bonjour. Bienvenue au MOOC Restructuration des quartiers précaires des villes africaines. Notre leçon d'aujourd'hui est consacrée aux caractéristiques et à la définition des quartiers précaires. Bien que les quartiers précaires soient tous différents, il est désormais établi que certaines caractéristiques leur sont communes, comme du reste, limites qui leur sont associées. La précarité d'un quartier s'apprécie d'abord sur le plan physique, c'est-à -dire sa constitution organique avant de s'intéresser à son contenu, c'est-à -dire ceux qu'il accueille et ce qu'il est en mesure de leur offrir, en termes d'équipements, d'infrastructures et de services. La complexité et la variété des situations exigent cependant que l'on soit nuancé lorsqu'il s'agit de leur attribuer des caractéristiques communes, surtout que celles-ci sont fortement liées aux modes et aux conditions de leur naissance. On peut ainsi s'appuyer sur leur constitution physique, leur contenu social et les statuts d'occupation qu'on y rencontre, pour faire ressortir leurs traits communs ou les caractéristiques propres pour chacun d'entre eux. Je vous propose donc le plan suivant en 3 points. Il nous amènera successivement à examiner l'exclusion urbaine et sociale de ces quartiers, leur précarité juridique, et la définition qu'on peut leur attribuer aujourd'hui. Les quartiers précaires sont souvent installés sur les terrains accidentés, marécageux ou ensablés. Les premiers quartiers étaient bien situés auprès des bassins d'emploi, mais les plus récents sont éloignés et installés sur les plus mauvais terrains des villes. Ce qui fait la ville, est absent. Il s'agit principalement de l'eau courante, de l'électricité, des écoles, des centres de santé et de l'assainissement. Il n'existe pas, non plus, de services de ramassage d'ordures et il faut souvent aller en ville, pour l'ensemble des autres services urbains. Les habitations sont souvent des abris de fortune, du fait de la densité et de la promiscuité. Elles sont souvent construites avec des matériaux de récupération, des tôles, des planches, des toiles ou parfois l'association de ces différents types. Lorsque la situation le permet, l'habitation est une juxtaposition d'espaces fonctionnels, aménagés au fil du temps. Du fait de cette précarité, visible à plusieurs niveaux, les populations finissent par être stigmatisées à cause d'un fort taux d'analphabétisme, et d'un niveau élevé de chômage, et les quartiers confondus avec des repères de banditisme et de délinquance. Sur le plan juridique, ces quartiers sont souvent installés sur des terrains publics ou privés. Il s'agit, la plupart du temps, de zones non encore affectées, ou des terrains déjà attribués qui attendent leur mise en valeur. L’occupation illégale de terrains empêche les populations d'investir dans l'amélioration du bâti, cela les maintient dans une situation de précarité foncière et d'insécurité car elles ne sont pas à l'abri d'un déguerpissement. Les images qui suivent, sont des illustrations des différentes formes de précarité, que l'on rencontre dans les quartiers précaires. Cette image est une illustration du bidonville de Kibera à Nairobi au Kenya. Elle reflète toute la misère qu'endurent les populations de ces quartiers précaires, qui vivent dans un cadre dépourvu de tout système d'assainissement, et où les ordures s'entassent au pied des habitations minuscules, dans une totale promiscuité. Nous sommes ici à Nouakchott, et contrairement à l'inscription Borne et Fontaine, il s'agit d'une niche électrique, qui permet aux ménages de se raccorder à l'électricité, moyennant un forfait mensuel. Il s'agit d'une pratique tout à fait légale, puisque c'est la société d'électricité, qui aménage ces niches, et en confie la gestion à un habitant du quartier. Cette image est celle du quartier Gobelet, à Abidjan, avant sa démolition, en 2012. Elle illustre les fortes densités que connaissent ces quartiers, qui s'installent souvent dans des interstices urbains, en l'occurrence ici un terrain en pente, qui jouxte Cocody, le quartier le plus huppé de la capitale ivoirienne. Nous somme ici à Pikine, à Dakar. Le quartier est confronté, chaque année, à des inondations récurrentes, et chaque hivernage, les habitants vivent les pieds dans l'eau, en l'absence de toute solution d'évacuation des eaux de pluie. Cette image est celle d'une colonisation de dunes vives, à la périphérie de Nouakchott. Les habitations sont installées indifféremment en crête ou en pied de dunes, dans un environnement austère, dénudé, et où aucune liaison motorisée n'est possible avec le reste de la ville. À ce stade de notre leçon, nous allons nous intéresser à la définition que nous pouvons retenir d'un quartier précaire. En d'autres termes, existe-t-il une définition consensuelle pour caractériser un quartier précaire? C'est en novembre 2002, qu'une définition officielle est fournie par l'ONU, pour caractériser un quartier précaire. Cette définition retient quatre critères relatifs à l’approvisionnement en eau potable, aux conditions d'assainissement, à la qualité des constructions et à la densité d'occupation des habitations, des critères mesurables par des indicateurs précis et pertinents dans tous les contextes. Je rappelle ici les critères de qualification retenue pour un quartier précaire dont on vient de parler, et qui sont donc ainsi libellés. Premièrement, l'accès insuffisant à l'eau potable, deuxièmement, un accès insuffisant à l'assainissement et aux autres infrastructures de base, troisièmement, une qualité de la structure du logement insuffisante, et quatrièmement, une forte densité d'occupation. L'observation d'un seul des critères permet de qualifier le quartier de précaire. Le critère de la sécurité foncière, un moment envisagé pour compléter ces quatre, n'a finalement pas été retenu, du fait de la difficulté de sa mesure par des indicateurs pertinents. Voilà sommairement décrits, les caractéristiques qui s'attachent au quartier précaire. Nous reparlerons de ces caractéristiques tout au long de ce cours, en précisant d'emblée, qu'il convient de rester prudent dans cette approche théorique de définition, car les choses ne sont jamais figées pour de bon. Ce qui détermine un quartier précaire, dans un contexte, peut changer dans un autre, et de la même façon, ce qui peut être considéré comme déterminant aujourd'hui, pour qualifier une situation de précarité, peut s'avérer inexact ou décalé quelques années plus tard. Nous avons ici cherché à regarder les invariants, ce qui est commun à toutes les situations, les contextes politiques et sociaux feront le reste, particulièrement, l'effet des politiques qui ont trait au contrôle de l'accès au foncier et la production de logements pour les catégories de population les plus faibles. [AUDIO_VIDE]