[MUSIQUE] [MUSIQUE] Après avoir abordé la question des leviers actionnés pour améliorer l'encours de l'investissement qualifié d'investissement à impact, nous nous devions d'explorer le levier que constituent les dispositifs de paiement aux résultats. Nos témoins nous l'ont dit, et nous allons le revoir, l'originalité de ces dispositifs est leur capacité à intégrer en leur cœur la création de valeur extra-financière en liant cette création de valeur extra-financière à la valeur économique. Dans cette session Allons plus loin, nous allons surtout nous attarder sur le contrat à impact, qui est la modalité phare des dispositifs de paiements aux résultats. Nous reviendrons sur son principe de fonctionnement, son histoire en France et dans le reste du monde, ainsi que sur ses enjeux de développement. Nous évoquerons, dans une dernière partie faisant office de conclusion et d'ouverture, d'autres types de dispositifs de paiements aux résultats. Commençons d'abord par la définition et les caractéristiques du contrat à impact. Quel en est le principe de fonctionnement? Le contrat à impact, historiquement qualifié de social, et CIS en abrégé, même s'il s'applique à présent au champ environnemental également, est donc la principale déclinaison des dispositifs de paiements aux résultats. On parle également, dans le monde anglo-saxon dont il est originaire, de social impact bond pay for success ou outcomes contracts. Comme vous pouvez le voir sur ce schéma projeté à l'écran, le contrat à impact réunit généralement trois types d'acteurs principaux, et deux types d'acteurs secondaires : l'État, ou plus largement une collectivité publique, des investisseurs privés, un ou des opérateurs sociaux, typiquement une entreprise de l'économie sociale et solidaire comme une association, auxquels s'ajoute un organisme tiers responsable de l'évaluation et de la mesure d'impact, et un structureur, responsable de la coordination des différentes parties de l'ingénierie juridique et financière du dispositif. Au centre du contrat à impact, on trouve un projet innovant porté par les opérateurs sociaux, et qui vise généralement la résolution ou la prévention d'un problème social répondant à un objectif de politique publique. Puisque le problème à résoudre relève d'une politique publique, comme par exemple la protection de l'enface, la réinsertion des détenus, l'insertion professionnelle ou la santé, l'état pourrait financer directment le projet par le biais de subventions. Mais l'état ou la puissance publique est assez réticent à prendre le risque de l'innovation. Un ou des investisseurs privés vont alors se substituer à l'État pour endosser la part de risque liée à l'innovation. La rentabilité de cet investissement sera directement liée à la performance du projet, évaluée par une série d'indicateurs d'impact précisément définis en amont, et figurant explicitement dans le contrat. Et l'État remboursera les investisseurs en fonction du niveau de réussite, en incluant une prime de réussite correspondant généralement à un intérêt de 3 à 5 % par an au maximum proportionnel à la performance sociale mesurée à l'issue d'un délai déterminé en amont, qui est généralement de quatre à cinq ans. Maintenant, quelle est la valeur ajoutée pour les différentes parties? Il s'agit à présent de comprendre quelle valeur ajoutée est suscitée par ce dispositif pour la collectivité, et ce faisant, l'intérêt qu'il présente pour le pouvoir public. Le contrat à impact n'a pas vocation à remplacer d'autres modes d'intervention publique, mais il propose un mode de financement complémentaire sur des formes d'intervention plus risquées où l'État ou la puissance publique n'a pas les capacités de porter le risque, qui est alors reporté sur l'investisseur privé. Le contrat à impact n'a pas vocation non plus à remplacer des investissements privés qui répondraient à des logiques financières de marché. C'est la raison pour laquelle il porte prioritairement sur des programmes de prévention à caractère essentiellement non marchand, ou supposant des coûts de mise en place très significatifs, ce qui disqualifie l'opérateur social d'un financement de marché, même à impact. En fait, la création de valeur, du point de vue strictement économique et financier, se fait plutôt à l'échelon de la collectivité en elle-même, puisque la prévention va permettre d'éviter des coûts de réparation : par exemple, le coût d'un prisonnier, l'indemnité versée à une personne sans activité, les dommages causés par la délinquance. Et le système va même générer des recettes via la création d'emplois, d'activités économiques, qui supposent par ailleurs des recettes fiscales pour l'État. Voilà , d'ailleurs, un avantage indéniable pour l'État et la puissance publique dans ce type de structuration, et tout l'intérêt qu'il y a à y participer. Quand un projet s'avère porter ses fruits, il doit rembourser des investisseurs privés, certes, mais en parallèle, l'État économise des dépenses et engrange éventuellement des recettes fiscales supplémentaires. C'est donc là une nouvelle manière d'envisager la dépense publique en l'optimisant par l'exigence de résultats intrinsèques au contrat d'impact. Sur le schéma qui s'affiche à l'écran, vous pouvez visualiser ce qui est finalement le principe fondamental du contrat à impact. L'intervention via le contrat à impact coûte moins cher que l'intervention de prévention ou de réparation habituelle. L'économie générée est utilisée en partie pour rémunérer les investisseurs qui ont pris le risque, laissant idéalement une économie nette pour l'État et la collectivité. Du point de vue de l'opérateur social, l'outil de financement présente, lui aussi, l'avantage de ce concentrer sur l'ADN du projet, qui est de créer l'impact, tout en lui permettant de s'abstraire des contraintes de financement, s'il s'agit de toute façon d'un projet sans modèle économique au moins à court terme. On ne parie pas sur la génération de cash-flows mais sur la génération d'impact. Enfin, les investisseurs privés peuvent investir dans des contrats à impact avec deux logiques. Soit le contrat à impact peut remplacer des subventions classiques, avec à la clé une perspective de retour sur investissement permettant de réinvestir des fonds dans d'autres projets ; soit le contrat à impact peut répondre directement à un objectif de placement financier à impact, à l'instar des autres types d'investissements à impact. Venons-en à la troisième question : Quels sont les pré-requis pour un contrat à impact? Tous les projets portés par l'économie à impact [INCOMPRÉHENSIBLE] d'être éligibles à un contrat à impact, et de manière similaire, toutes les politiques sociales ne s'y prêtent pas. L'AVISE, l'Agence de valorisation des initiatives socio-économiques, note plusieurs conditions de réussite. D'abord, l'existence d'un projet déjà identifié et délimité, avec un impact quantifiable. Ensuite, un horizon d'impact pas trop lointain, de trois à six ans pour faciliter la mesure. Ensuite, une taille suffisante du projet, pour supporter les coûts fixes liés à la structuration. On parle d'un montant avoisinant 1 million d'euros. La possibilité de définir un petit nombre de facteurs déclencheurs, là aussi pour faciliter la mesure. Une capacité opérationnelle de l'opérateur à suivre et mesurer les indicateurs. Ajoutons à ces caractéristiques, et c'est crucial, l'anticipation de gains futurs pour la collectivité, qui n'aura pas à réparer un dommage social ou environnemental, qu'il s'agisse, comme nous l'avons vu, de coûts évités ou de recettes additionnelles. Enfin, voyons pour conclure le rôle fondamental de la mesure de l'évaluation de l'impact. La mesure de l'évaluation de l'impact a un rôle clé dans ce genre de dispositif plus encore que dans les formes habituelles d'investissement à impact, puisque c'est sur elle que repose la rémunération des investisseurs. La mesure sera effectuée par un organisme tiers indépendant. Le choix des indicateurs est déterminant puisque ces derniers doivent permettre d'objectiver la performance sociale du dispositif tout en étant calibrés par rapport au risque financier que les investisseurs consentent. Le rapport Lavenir, que j'ai cité tout à l'heure, mentionne trois facteurs clés pour un dispositif d'évaluation et de mesure d'impact efficace : un, définir une vision commune partagée entre les trois acteurs principaux des objectifs fondamentaux du projet ; deux, s'assurer d'une compréhension réciproque de la logique et des contraintes des autres acteurs ; et trois, renoncer à la complexité et à la perfection, et préférer une approche simplifiée et conforme aux objectifs de politiques publiques.