[MUSIQUE] Commençons notre étude quantique du puits de potentiel à une dimension par le cas des états de diffusion, qui sont, par définition, des états propres de l'hamiltonien associés à une valeur positive de l'énergie E. En remplaçant l'hamiltonien par son expression pour un problème à une dimension spatiale, on obtient une équation différentielle portant sur la fonction psi(x). Puis, en faisant passer le terme E psi(x) dans le membre de gauche, nous voyons qu'il s'agit en fait d'une équation différentielle linéaire d'ordre deux, sans second membre. Les propriétés mathématiques des équations de ce type, que l'on retrouve souvent en physique, sont bien connues. Rappelons deux de ces propriétés qui nous seront utiles par la suite. Tout d'abord, pour une valeur donnée de l'énergie, l'ensemble des solutions constitue un espace vectoriel de dimension deux. Il existe donc une infinité de solutions qui pourront s'exprimer comme combinaison linéaire de deux fonctions de base. La résolution du problème reviendra donc à identifier deux fonctions propres linéairement indépendantes, de préférence orthogonales, constituant une base de notre espace propre. Concernant la deuxième propriété, je vous laisse le soin de la retrouver vous-même dans le quiz qui va suivre. Comme vous avez pu le vérifier, si psi et sa dérivée sont connues au point x0, alors la fonction psi(x) est déterminée de manière unique dans l'ensemble de l'espace. Ce résultat n'est pas très surprenant, car pour déterminer psi(x), il suffit de connaître les deux coefficients complexes caractérisant sa décomposition dans une base donnée de notre espace propre de dimension deux. Or, les conditions initiales sur la fonction et sa dérivée nous fournissent justement un système de deux équations à deux inconnues, permettant de déterminer de manière unique les deux coefficients complexes recherchés. Avant de nous attaquer au problème du puits de potentiel, rappelons brièvement la forme que vous connaissez bien, les solutions en l'absence de potentiel, ce qui revient à supprimer le terme V(x) dans l'équation différentielle. Dans ce cas, il est judicieux de poser E = (h barre 2 k^2) / 2m, où par définition, k = racine de (2mE) / h barre. En remplaçant E par son expression dans l'équation différentielle, on voit que l'on peut mettre en facteur le terme (h barre^2) / 2m, qui apparaît dans les deux termes de l'équation. Puis, en éliminant ce préfacteur, ainsi que le signe -, on arrive directement à l'équation (d^2 psi) / (dx^2) + k^2 psi = 0. C'est une équation différentielle linéaire du second ordre, à coefficients constants. Comme vous le savez, on peut écrire la solution générale de cette équation sous la forme psi(x) = A e puissance (i k x) + B e puissance (- i k x), où A et B sont deux nombres complexes arbitraires. On retrouve bien la structure attendue d'espaces vectoriels de dimension deux, avec les deux fonctions de base e puissance (+ ou- i k x), qui correspondent à deux ondes se propageant soit vers la droite, soit vers la gauche. On reconnaît évidemment, dans la grandeur k, le vecteur d'onde. Intéressons-nous maintenant à la représentation graphique des solutions que nous venons de calculer, en commençant par le cas où seule l'onde se propageant vers la droite est présente, ce qui correspond à B = 0. Dans un premier temps, contentons-nous de représenter la partie réelle de la fonction d'onde complexe, ce qui nous donne une sinusoïde dont la période est la longueur d'onde de De Broglie, lambda = 2 pi / k. Comme on peut s'y attendre, cette longueur d'onde augmente lorsque l'énergie diminue. Mais l'inconvénient de cette représentation partielle est qu'elle ne permet pas de distinguer entre une onde se déplaçant vers la droite ou vers la gauche, car e puissance (i k x) et e puissance (- i k x) ont la même partie réelle. Par la suite, nous allons donc plutôt représenter le module de psi en fonction de x, qui dans ce cas précis est indépendant de x, mais surtout en utilisant en plus un code couleur nous permettant de visualiser la phase de psi(x). Le fait que la phase varie en fonction de x de la même manière que notre code couleur dans le sens direct nous indique que la phase est une fonction croissante de x, et donc qu'on a bien une onde se propageant vers la droite. À l'inverse, si on considère le cas où c'est A qui est nul, on voit que le sens de variation de la phase s'inverse, ce qui correspond alors à une onde se propageant vers la gauche. Pour la suite, nous allons représenter les coefficients A et B, chacun à l'aide d'un point dans le plan complexe. Dans le cas général où A et B sont non nuls, on observe une modulation résultant de l'interférence entre les deux ondes se propageant en sens contraires. Si A et B sont égaux, le contraste de cette modulation atteint 100 %, puisqu'on retrouve alors une fonction sinusoïdale. Pour A et B réels, on remarque d'ailleurs que la fonction d'onde en cosinus k x est réelle, soit positive, phase nulle codée en turquoise, soit négative, phase égale à pi, codée en rouge. Enfin, en faisant varier A et B dans le plan complexe. On peut décrire l'espace propre de dimension deux, comprenant l'ensemble des solutions de notre équation différentielle. Revenons maintenant au cas général d'un potentiel non nul, et cherchons un état propre de l'hamiltonien d'énergie E positive. Comme précédemment, nous définirons la grandeur réelle k pour écrire E = (h barre^2 k^2) / 2m. Comme on sait que le potentiel tend vers 0 lorsque x tend vers moins l'infini, on peut considérer une région de l'espace, représentée ici en gris, telle que le potentiel y soit arbitrairement proche de 0. Dans cette région, nous nous ramenons donc au cas précédent et nous savons que, au moins dans la zone grisée, la solution recherchée s'écrit A e (i k x) + B e (- i k x). Il s'agit donc de la superposition de deux ondes progressives se propageant en sens contraires. Considérons dans un premier temps le cas où A est nul, correspondant à une onde progressive se propageant de la droite vers la gauche, et représentons la fonction d'onde associée en utilisant notre code couleur habituel. La fonction obtenue est une fonction périodique de période lambda = 2 pi / k, où lambda est ici la longueur d'onde de De Broglie pour l'onde libre, c'est-à -dire en l'absence de potentiel. Au point x0, défini comme la limite de la zone grisée, nous connaissons la valeur de la fonction d'onde, e (- i k x0), et de sa dérivée, qui est égale à - i k e (- i k x0). Rappelons-nous que cette double condition initiale détermine de manière unique la solution psi(x) de l'équation différentielle du second ordre pour toute valeur de x. Compte tenu de la forme un peu compliquée du potentiel choisi ici, on doit évidemment avoir recours à une résolution numérique pour trouver cette solution unique, ce qui nous permet alors de prolonger la fonction d'onde dans tout l'espace. On peut faire trois observations sur la fonction d'onde obtenue. Première observation, la solution dans la partie grisée à droite du puits a exactement la même forme que dans la partie gauche, à savoir celle d'une onde progressive de vecteur d'onde -k, ce qui n'est a priori pas très étonnant, puisque le potentiel peut également être considéré comme nul dans cette zone. Deuxième observation, les plans d'ondes ne sont pas tout à fait équidistants à l'intérieur du puits. Si on utilise comme référence la longueur d'onde de De Broglie de l'onde libre, on observe que la période de l'onde à l'intérieur du puits est en fait légèrement plus petite qu'à l'extérieur, ce qui signifie que le vecteur d'onde correspondant est légèrement plus grand. Ce résultat nous permet de donner une interprétation physique très simple de la solution obtenue. Nous avons ici une onde de De Broglie qui vient de la droite. Lorsque l'onde pénètre dans le puits, l'énergie potentielle diminue, donc l'énergie cinétique augmente, ce qui veut dire que l'impulsion devient plus grande, et que la longueur d'onde est réduite. Pensez à l'expression lambda = h / p. En sortant du puits, l'énergie potentielle est à nouveau nulle et l'onde retrouve son vecteur d'onde initial. Ce comportement est donc en tout point similaire à celui que nous avions rappelé pour la mécanique classique, à ceci près que nous employons maintenant un langage ondulatoire. Troisième et dernière observation sur la fonction d'onde obtenue. C'est la légère modulation que vous pouvez voir sur le module de la fonction à l'intérieur du puits. Ceci est simplement lié à la conservation du courant de densité de probabilité. En effet, comme l'onde se déplace plus vite dans le puits, il faut pour compenser que la densité de probabilité y soit plus faible, car le courant est proportionnel au produit de la densité de probabilité par le vecteur d'onde. C'est pour cela que l'on retrouve la forme du potentiel imprimée sur le module de la fonction d'onde. Diminuons maintenant la valeur de l'énergie et regardons ce qui se passe à droite du puits. Nous observons une légère modulation sinusoïdale du module de la fonction d'onde, qui se creuse davantage si l'on diminue encore la valeur de l'énergie. Nous avons ici clairement l'interférence entre deux ondes se propageant en sens contraires, ce qui correspond finalement à la solution générale de l'équation dans cette région de l'espace en A' e (i k x) + B' e (- i k x). Nous devons donc réviser notre interprétation initiale, et prendre en compte maintenant la présence d'une onde réfléchie par le puits de potentiel qui interfère avec l'onde incidente pour donner la modulation observée. Nous avons désormais un comportement véritablement ondulatoire avec une onde incidente, dont une partie est transmise et l'autre réfléchie par le puits de potentiel. On retrouve ici exactement la même physique que celle que vous connaissez bien pour la marche ou la barrière de potentiel. Pour terminer, rappelons que la fonction considérée ici n'est qu'une des fonctions de base engendrant notre espace vectoriel de dimension deux. L'autre fonction de base en e (+ i k x), dans la partie gauche du puits, correspond à la situation où deux ondes convergent vers le puits de potentiel, et interfèrent de manière parfaitement destructive pour qu'il n'y ait pas d'onde émise vers la partie gauche, et que la particule reparte avec certitude vers la partie droite. Enfin, la solution générale correspond au cas où deux ondes convergent vers le puits de potentiel, donnant naissance, après diffusion par le puits, à deux ondes se propageant l'une vers la gauche et l'autre vers la droite. Pour une valeur bien précise du rapport entre A et B, on peut par exemple construire la solution particulière correspondant au cas où une onde venant maintenant de la gauche donne naissance à une onde transmise et à une onde réfléchie. En résumé, dans cette leçon, nous avons étudié les propriétés des états de diffusion pour un potentiel V(x) à une dimension, dont on a supposé qu'il tendait vers 0 de part et d'autre du centre du puits. Rappelons qu'avec ce choix de l'origine des énergies, un état de diffusion est par définition un état associé à une valeur positive de l'énergie. Nous avons trouvé que toute valeur positive de l'énergie était bien permise, c'est-à -dire que n'importe quelle valeur positive de l'énergie donnait effectivement lieu à une solution physiquement acceptable. Par ailleurs, on a montré que chaque valeur propre était dégénérée deux fois, ce qui signifie que l'ensemble des fonctions propres psi(x) associées à cette valeur propre constituait un espace vectoriel de dimension deux. Même si ces résultats sont finalement conformes à ceux à quoi on s'attendait d'après les propriétés mathématiques d'une équation différentielle linéaire du second ordre, la prochaine leçon va nous donner des résultats sensiblement différents pour les états liés.