[AUDIO_VIDE] Bonjour. Bienvenue au cours de physique générale de l'EPFL. Dans cette leçon, je vais introduire les bases de la dynamique newtonienne. Suivant Newton, je vais commencer par définir la quantité de mouvement, par analogie avec ce qu'on appelle la quantité de matière. Je vais ainsi définir l'état de mouvement d'un système. Ayant une grandeur physique pour définir l'état de mouvement, je vais pouvoir énoncer comme Newton deux lois, la loi dite d'inertie et la loi sur la dynamique. Je commence avec la définition de la quantité de matière. D'habitude, on l'appelle la masse. Cette masse est une grandeur physique dite extensive. Ce qu'on veut dire par extensif, c'est que si on considère un système formé de deux sous-parties et qu'on connaît la masse de chacune des sous-parties. alors le tout, le système entier a une masse qui vaut la somme des masses. Ce caractère additif d'une grandeur physique, on appelle l'extensivité. La quantité de matière, la masse, est une grandeur extensive. La masse est aussi une grandeur conservée. Ce que je veux dire par là c'est que si un système devait changer de masse, c'est ou bien que de la matière quitte le système ou arrive dans le système. Vous pouvez penser à une fusée. Une fusée éjecte de la matière, alors sa masse varie. Mais la masse globale reste conservée. Par exemple, on peut définir un système fermé, un système qui n'échange pas de matière avec le monde extérieur. À propos, l'opposé s'appelle un système ouvert. Un système qui échange la matière avec l'extérieur est un système ouvert. Si on a un système fermé, la masse, quelle que soit l'évolution du système, est constante, ou comme on dit aussi est conservée. Pour me conformer avec le Système international des unités, j'imagine que j'ai une fois pour toute défini un étalon de masse. Cela veut dire que j'ai aussi des copies de cet étalon et des multiples de cet étalon. Et je dois maintenant définir une expérience par laquelle je décide si la masse que je considère est égale à un certain multiple de l'étalon. C'est important en physique de définir des expériences même virtuelles mais qui explicitent un concept. Einstein avait popularisé cette façon d'expliquer les sciences, et ici j'applique cette approche. Je veux définir une méthode expérimentale qu'on ne réalisera peut-être pas parce qu'il y a trop de difficultés mais qui conceptuellement nous permet d'identifier ce qu'on appelle l'égalité des masses. Alors je vous propose le schéma suivant. Vous avez un banc à air. Ceci est un banc à air. On insuffle de l'air ici, l'air sort par les trous. On peut ainsi négliger le frottement qui s'exerce sur les deux plots. Un des plots sera un multiple de l'étalon connu, un multiple connu, et l'autre c'est la masse qu'on veut mesurer. J'imagine qu'entre les deux, il y a un dispositif tel un ressort comprimé, et j'imagine que je peux délicatement relâcher le ressort à partir d'un état au repos. Donc le système entier est au repos par rapport au banc à air qui est présumé être dans le référentiel. Alors je dois observer si les deux masses sont égales. Je dois observer des vitesses d'éjection des deux plots égales et opposées. Maintenant, ayant défini une quantité de matière, la masse, j'aimerais définir une quantité de mouvement. Je veux une grandeur physique qui caractérise l'état du mouvement. Cette grandeur doit avoir un caractère vectoriel. Je dois avoir une direction du mouvement, un sens du mouvement et une intensité du mouvement. Donc je veux une grandeur vectorielle. Je veux aussi une grandeur extensive à nouveau. Ça veut dire que si j'ai deux sous-systèmes qui ont des quantités de mouvement données, la quantité de mouvement du système entier est la somme des quantités de mouvement des deux sous-systèmes. Donc je veux une grandeur extensive. Je peux maintenant passer à la première loi de Newton. Newton disait, Tout corps persévère dans l'état de repos ou de mouvement uniforme en ligne droite à moins que quelque force n'agisse sur lui et ne le contraigne à changer d'état. D'abord je note qu'on parle de mouvement, donc on doit s'être donné un référentiel. Et on verra avec la pratique que cette première loi de Newton nous définit un certain type de référentiels. D'ailleurs on va leur donner un nom tout à l'heure. D'autre part, je constate que l'idée d'avoir un corps libre de toute force est présumée être une idée évidente. On verra que lorsqu'on travaille avec des référentiels accélérés, cela devient moins évident. Enfin, il faut noter du point de vue de l'histoire des sciences une évolution extraordinaire. On a maintenant érigé en principe l'observation que faisait déjà Galilée selon laquelle un point matériel libre de force suit un mouvement rectiligne uniforme. Galilée avait appelé ce mouvement le mouvement naturel. On n'est plus du tout en train de chercher une cause à un mouvement existant. On va définir comme référentiel d'inertie un référentiel dans lequel la loi d'inertie est vérifiée. On appellera ce référentiel un référentiel d'inertie. J'aimerais faire une remarque à ce sujet. On n'est pas en train de faire des maths, on fait de la physique. Il y a un côté pragmatique à cette définition. En effet, si vous voulez considérer quelque chose, un phénomène comme la trajectoire d'une craie que vous lancez dans l'auditoire, alors probablement que l'auditoire est un assez bon référentiel. On verra quand on fera la dynamique terrestre que si on s'aventurait à faire des mesures extrêmement précises, on serait obligé de se dire, il y a une petite déviation, c'est une très petite déviation, dont on ne rend pas compte, et cela vient du fait que le référentiel n'est pas un référentiel d'inertie. On peut aussi faire une expérience particulièrement subtile, et on la fera. C'est l'expérience du pendule de Foucault qui permet en l'espace de dix minutes de voir que décidément cet auditoire n'est pas un référentiel d'inertie. Donc le choix du référentiel, déclarer si ce référentiel est d'inertie ou pas, va dépendre du type de mesure, de la nature de l'expérience et de la précision des mesures qu'on va faire. Je veux maintenant donner une définition de la force. Je veux donner une expérience, même virtuelle, qui me définit la force. Je suppose qu'un point matériel subit une force que je veux mesurer. Je me munis d'un dynamomètre et j'accroche ce dynamomètre avec l'aide d'un fil à mon point matériel qui subit la force que je veux mesurer. La lecture du dynamomètre me donnera l'intensité de la force, et la direction du fil me donnera la direction de la force. Encore une fois, il est important que les grandeurs physiques que l'on veut traiter puissent être définies par des expériences même si ces expériences sont délicates à conduire avec précision. Je passe maintenant à la deuxième loi de Newton. Newton disait, Les changements de mouvement sont proportionnels à la force motrice et se font dans la ligne droite dans laquelle cette force est imprimée à l'objet. Alors, il faut un peu traduire en langage moderne l'expression de Newton, la deuxième loi. D'abord, ce qu'on appelait force motrice à l'époque, de nos jours c'est la force fois le temps pendant lequel la force est appliquée. Ensuite, quand Newton dit, le changement de mouvement, il faut y comprendre le changement de l'état de mouvement, donc le changement de la quantité de mouvement. Si je veux transcrire la deuxième loi de Newton dans le langage moderne avec la notation vectorielle, je vais écrire ce que j'ai indiqué ici, p c'est la quantité de mouvement, et j'ai donc la dérivée par rapport au temps de la quantité de mouvement qui est égale à la force. À ce stade-là , j'ai admis qu'il existe une grandeur vectorielle extensive qui caractérise l'état du mouvement, mais je ne sais pas encore comment exprimer la quantité de mouvement en particuler en fonction de la masse et de la vitesse. Je donne maintenant un argument qui va nous convaincre que la quantité de mouvement, c'est la masse fois la vitesse. Je commence avec la masse. Le fait que la masse est une grandeur extensive et la quantité de mouvement est aussi une grandeur extensive a une conséquence pour cette histoire. En effet, si maintenant je considère un système de taille donnée et j'en prends des multiples. Je vais en prendre des multiples réels. Je vais appeler k ce nombre réel. J'imagine que j'augmente la taille du système par un coefficient k. La masse du système est une grandeur extensive. Alors, on aura k fois la masse d'un système. Et pour la quantité de mouvement, on aura quelque chose de semblable. On doit écrire que la quantité de mouvement d'un système qui a k fois la masse m à une vitesse donnée, on va prendre tous les systèmes à la même vitesse, ça doit être k fois la quantité de mouvement qu'on aurait pour un système à cette vitesse. Et maintenant, je considère cette expression-là comme contenant de chaque côté du signe égal une fonction de k. Ici, on a une fonction de k assez simple. Ici, on a p qui est une fonction de km, et km est une fonction de k. Et je veux en calculer la dérivée. Je vais l'écrire de la manière suivante. Ici, j'ai une petite difficulté parce que j'ai un argument qui vaut km. Ce que je veux c'est dériver p par rapport à cet argument, et ensuite je dois dériver l'argument par rapport à k. Cette dernière va donner m. La dérivée de l'argument, c'est-à -dire de km par rapport à k, ça nous donne m. Voilà le m. Et maintenant, on a la dérivée de p par rapport à l'argument. On va le prendre à k égale 1, donc on va écrire δ de p sur δ de m. Cette notation-là est tout à fait conventionnelle. Elle intervient chaque fois qu'on a des fonctions de plusieurs variables. Ce d rond indique qu'il y a plusieurs variables. Et ici, en écrivant δm, je spécifie quelle est la variable par rapport à laquelle on dérive, en supposant que toutes les autres variables sont maintenues constantes. C'est une notation qu'on utilise beaucoup en physique. De l'autre côté du signe égal, je dois dériver par rapport à k. p de m n'a rien à voir avec k, donc j'ai simplement la dérivée de k qui vaut 1, donc j'ai p. Alors voilà , je trouve que p est proportionnel à m et à ce coefficient-là . Ce coefficient-là est le rapport de deux grandeurs extensives. Je sais en plus que ce coefficient-là ne dépend pas de la taille du système. Maintenant, je vous ai annoncé le résultat p égale mv, je viens de montrer que le caractère extensif de p nous impose que p soit proportionnel à la masse m, il me reste à vous montrer que p est proportionnel à la vitesse. Cela, je vais le faire, mais je ne peux pas le faire par une approche axiomatique. Je dois envisager des expériences, faire des expériences et observer que p est proportionnel à m. Je vous propose une expérience, si on la faisait, qui pourait prendre l'allure suivante. On a encore une fois mon banc à air et j'ai deux plots. Un plot est monté avec une pointe fixe, elle est fixée au plot, et l'autre plot contient une boule de pâte à modeler ou de suif. Et je présume que lorsque je fais une collision entre les deux plots, la pointe s'enfiche dans la pâte à modeler et y reste. Donc les deux systèmes sont ensemble. Je considère maintenant des collisions qui laissent les deux plots assemblés à une vitesse nulle par rapport à mon référentiel défini par le banc à air. Je pourrais avoir dans un premier temps deux masses égales et des vitesses égales et opposées. Je constate que j'ai donc la quantité de mouvement totale est nulle, et en effet, lorsque les deux systèmes se rassemblent, le système entier est immobile, la quantité de mouvement est nulle. Et maintenant, j'observe que si un des plots est deux fois plus lourd, je vais devoir diminuer la vitesse d'un facteur 2 pour obtenir le même effet, c'est-à -dire l'immobilité du système après le choc. Par conséquent, avec des expériences de ce type, j'ai juste pris un facteur 2, mais on pourrait multiplier les expériences, et on devrait conclure que la quantité de mouvement est proportionnelle à la vitesse. Ce que je viens de vous dire dépend de la nature des expériences que je considère. Et depuis Newton, la physique a évolué. Vous allez voir d'autres circonstances, d'autres champs de forces pour lesquels la quantité de mouvement a une autre allure. Et dans le cadre de ce cours, nous allons voir une expression relativiste de la quantité de mouvement, donc la théorie d'Einstein, qui va nous donner une autre expression de la vitesse. Si je résume notre dynamique du point matériel, nous avons conclu que p égale mv, pour le genre d'expérience qu'on veut bien considérer. Et si maintenant je dérive cette expression-là par rapport au temps, la dérivée de la vitesse par rapport au temps, ça va nous donner l'accélération. La dérivée de p par rapport au temps, la deuxième loi de Newton nous dit que cela vaut la force. Donc j'ai la force qui vaut la masse fois l'accélération pour un point matériel.