[MUSIQUE] [MUSIQUE] >> Bonjour. Dans cette séquence, nous allons parler de la prise en charge des difficultés sensorielles dans le cadre des troubles du spectre de l'autisme. Et nous avons la chance d'avoir en interview madame Kristine Jaccoud, qui est ergothérapeute et qui travaille en cabinet privé, pour nous parler de cette thématique. Bonjour Kristine Jaccoud. Merci beaucoup d'être avec nous dans le cadre de ce MOOC. Pour commencer, est-ce que vous pouvez nous rappeler brièvement ce qu'on entend par difficultés sensorielles dans le cadre des troubles du spectre de l'autisme? >> Oui, d'accord. C'est un plaisir d'être ici, d'abord. Je voulais dire que les troubles sensoriels dans le cadre de l'autisme s'inscrivent maintenant dans les critères de diagnostics, et ceci dans une hyper-réactivité ou une hypo-réactivité sensorielle. Au niveau de l'hyper-réactivité, ce qu'on aimerait dire c'est que la personne réagisse trop vite à un certain niveau de stimulation que vous et moi et des personnes tout-venant arrivent à gérer, ou que la personne réagit même avant que d'autres personnes réalisent que cette stimulation sensorielle est présente dans l'environnement. L'hypo-réactivité, c'est quand la personne ne réagit pas assez vite à un certain niveau de stimulation, ou qu'elle a besoin que cette sensation soit amplifiée, plus intense ou d'une durée plus importante avant qu'elle puisse réagir. Maintenant, ça, c'est la base, mais en réalité, les gens ont un profil mixte. C'est rare qu'on voie quelqu'un qui est purement hyper-réactif ou purement hypo-réactif. C'est plus souvent un profil mixte des deux. >> Finalement, quel est l'impact de ces difficultés sensorielles dans la vie quotidienne d'un jeune avec TSA? >> Les réactions sont aussi diverses que le type de trouble et dans quel domaine sensoriel ces troubles existent. Par exemple, au niveau des hypo-réactivités, on peut avoir quelqu'un qui a besoin de plus, qui est hypo-réactif au niveau stimulaire, et ça veut dire au niveau des mouvements. Et typiquement, ces personnes-là recherchent cette stimulation supplémentaire dont ils ont besoin et ils sont en train de bouger tout le temps. Ce sont des gens qui n'arrivent pas à rester assis à la table à manger, au restaurant, dans la salle de classe. Ils bougent tout le temps, ils gigotent sur la chaise, et donc c'est un impact de distraction de ce qu'ils doivent faire à ce moment-là. Les gens qui sont hyper-réactifs, eux, sont plus dérangés par les stimulations. Et parfois, on voit des comportements d'évitement. Ils ne veulent pas mettre certains vêtements parce qu'ils ont cette hyper-réactivité tactile à la couture ou bien au tissu lui-même. Ça peut créer des problèmes. Ils n'acceptent que de mettre des bottes en caoutchouc, par exemple, et pas des chaussures, pas de chaussettes. Et ce comportement d'évitement peut provoquer beaucoup de crises, de refus et d'angoisse pour la personne avec autisme. >> Typiquement, vous, quand vous recevez un jeune en cabinet, comment est-ce que vous allez évaluer ces difficultés sensorielles? >> L'évaluation est multi-facettes. On utilise principalement des observations cliniques et des informations qu'on récolte de l'entourage ou de la personne elle-même. Ça, c'est encore plus précieux quand c'est possible, mais pour certains petits enfants, c'est plus difficile. Et on utilise aussi les évaluations standardisées. Typiquement, nos observations cliniques peuvent se passer en cabinet, où on va préférer mettre la personne en situation pour voir comment elle réagit à telle ou telle stimulation. Et si on a l'opportunité, c'est très précieux de pouvoir aller dans les lieux de vie à l'école, à la maison, à la crèche, sur la place de travail de la personne, pour voir comment elle réagit aux stimulation dans ces différents environnements, pouvoir parler avec les parents, les enseignants, les éducateurs, les gens qui entourent l'enfant. Parce que nous, malgré nos observations cliniques qui sont très utiles, évidemment, c'est comme une photo à ce moment-là, ce jour-là pour le jeune. Et d'avoir une idée plus globale qui est donnée par l'entourage nous permet de mettre tout ça en contexte. >> Oui. >> Et les évaluations standardisées nous permettent de discerner si les comportements de l'enfant sont dans la norme pour son âge ou si c'est plus marqué au niveau d'une hyper-réactivité ou d'une hypo-réactivité. >> Et si vous identifiez certaines difficultés sensorielles chez un jeune, quel type d'intervention vous pouvez proposer pour cibler ces difficultés sensorielles? >> À mon avis, c'est une approche multi-facettes qu'il est important de mettre en place pour un jeune avec des troubles de traitement d'informations sensorielles, et si possible qu'on utilise en combinaison des approches cognitives, pour que la personne se rende compte de ses besoins, mais aussi des approches vraiment sensorielles, physiques. Parmi les approches cognitives, celles qui sont le plus connues sont soit le programme Alert, ou le programme Zones of regulation. Et tous les deux encouragent l'individu à prendre connaissance de son état actuel d'hypo ou d'hyper-réactivité. Et par la suite, avec ces programmes, on essaie d'enseigner au jeune quels sont les outils qu'il peut utiliser pour régulariser son état de stimulation, comment quelqu'un avec une hypo-réactivité peut trouver la stimulation dont il a besoin sans que ça ne soit inadapté à la situation ou dérangeant pour les autres ; ou bien quelqu'un avec une hyper-réactivité, comment il peut se protéger des distractions que ça va engendrer, ou du dérangement et des sentiments négatifs que ça peut provoquer. Ça demande une capacité de discerner, identifier son propre état pour pouvoir savoir quels sont les outils, quelles sont les petites stratégies à mettre en place par la suite. Et les stratégies peuvent être vraiment très discrètes. Par exemple, ça peut être prendre quelque chose à mâcher, et ça peut être des choses plus voyantes comme de mettre des [INCOMPRÉHENSIBLE] dès que les niveaux sonores >> sont importants. >> Exactement, de s'asseoir sur un petit coussin malléable, pour les gens qui ont besoin de plus bouger. Les études dans le domaine de l'ergothérapie nous ont montré qu'une seule stratégie de ce type-là n'est pas très efficace. C'est beaucoup plus efficace quand c'est dans le contexte d'un programme sensoriel individualisé. Ce programme sensoriel individualisé n'est pas à mettre juste dans un seul contexte, par exemple à table, mais vraiment dans la vie complète de la personne, pour qu'on l'aide à s'auto-réguler tout le temps. Maintenant, il y a quelques