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Pour cette dernière vidéo, nous allons nous intéresser aux systèmes amplifiés.
En effet, comme vous l’avez vu dans le quiz précédent,
pour un oscillateur femtoseconde typique, avec un taux de répétition de
100 mégahertz et une puissance moyenne de un Watt,
l’énergie par impulsion est de l’ordre de 10 nano joules.
Ce qui permet déjà de, de, d’effectuer un certain nombre d’applications mais pour
d’autres applications, on a besoin de plus de puissance crête, ce sera insuffisant.
Donc, la solution pour cela consiste à amplifier certaines des impulsions,
certaines de ces impulsions pour pouvoir maintenir une puissance moyenne,
modérée, tout en augmentant l’énergie des impulsions que l’on a choisi d’amplifier.
Donc, par exemple, ce qu’on va faire, c’est qu’on va amplifier les
impulsions d’un oscillateur à un taux de répétition de un kilohertz,
ce qui signifie qu’on va amplifier une impulsion sur 100 000, et donc on pourra,
à puissance moyenne constante, avoir un gain d’un facteur 100 000 sur l’énergie de
l’impulsion, et on passera comme ceci de dix nano joules à un millijoule,
ce qui permet déjà de faire beaucoup plus d’effet non linéaire que,
simplement avec les impulsions d’un oscillateur femtoseconde.
Alors, cependant, les choses ne sont pas aussi simples que ça car si on se
contente d’amplifier d’un facteur 100 000 les impulsions produites par un
oscillateur femtoseconde, on va avoir dans l’amplificateur lui-même des puissances
crête qui seront considérables, et vous allez avoir, par exemple, en raison de
l’effet Kerr optique une intégrale B qui va être très au-dessus de ce qui est
tolérable, et vous aurez donc des effets non linéaires comme ceux qu’on a vus.
Vous aurez une auto focalisation du faisceau lumineux,
et même à de tels niveaux de puissance, vous allez,
vous allez détériorer complètement le, le profil spatial du faisceau lumineux,
et le plus souvent vous allez endommager le matériau amplificateur lui-même.
Donc, on ne pourra pas directement amplifier les impulsions femtosecondes.
Pour résoudre ce problème,
on utilise une méthode qui est héritée des technologies radar, c’est-à-dire qu’on va
étirer les impulsions pour pouvoir les amplifier, et ensuite, les recomprimer.
Donc, cette méthode d’amplification s’appelle l’amplification à
dérive de fréquence, ou chirped pulse amplification en anglais,
et a été démontrée en 1985 par Donna Strickland et Gérard Mourou.
Donc, l’idée consiste, comme je le disais, à allonger la durée des impulsions.
Donc, pour ça, on va prendre un oscillateur femtoseconde qui produit un
train d’impulsions très brèves, et on va envoyer ces impulsions dans un dispositif
optique qu’on appelle un, un étireur, et dont la caractéristique sera d’imprimer à
l’impulsion une phase spectrale quadratique avec une courbure positive.
Donc, comme un, comme un morceau de verre, par exemple.
Dans certains cas,
ça pourra suffire si les impulsions ont un spectre assez large, mais le plus souvent,
on va utiliser un système optique qui sera constitué, par exemple,
de réseaux et d’éléments convergents, comme des lentilles ou des miroirs.
En sortie de ce dispositif, on aura donc une impulsion qui présente une dérive de
fréquence positive, c’est-à-dire que le rouge va être sur le front avant et le
bleu sera sur le front arrière,
et on aura donc séparé les différentes composantes spectrales de l’impulsion.
Dans une deuxième étape,
on vient amplifier ces impulsions, avec un amplificateur au saphir dopé titane,
ce qu’on, ce qu’on va noter Ti pour titane et saphir.
Et, ensuite,
on va donc comme ceci avoir des impulsions d’énergie beaucoup plus importantes.
On pourrait avoir des gains, donc de, facilement, comme je le disais tout à
l’heure, de l’ordre, de l'ordre de 100 000 voire beaucoup plus.
Et, comme l’impulsion est longue,
et bien on n’aura pas les effets non linéaires nuisibles dont je parlais tout à
l’heure, en tout cas, ils resteront modérés, et donc,
on pourra avoir une intégrale B acceptable en sortie du milieu amplificateur.
Et puis, enfin, dans une dernière étape, on va utiliser un système compresseur,
donc, qui va avoir lui un phi seconde négatif, qui va compenser non seulement
le phi seconde positif de l’étireur mais également la phase spectrale du
second ordre qui se sera accumulée dans le milieu amplificateur, pour qu’on ait en
sortie du dispositif, l’impulsion la plus courte possible, et avec une énergie,
donc, qui aura été multipliée par un facteur de l’ordre de 100 000, ou,
comme je le disais, beaucoup plus.
Alors, l’intérêt, c’est que, ces systèmes à compresseur,
donc ça pourrait être par exemple un ensemble de deux réseaux de diffraction,
et donc l’impulsion, elle ne va pas traverser de milieu matériel, comme des,
des éléments optiques qu’il y aurait dans l’amplificateur,
et donc on n’aura pas les effets non linéaires dont je parlais tout à l’heure.
Alors, il faudra néanmoins des réseaux de diffraction qui soient capables de
tenir la puissance crête des impulsions amplifiées, ce qui n’est pas toujours
évident, et puis pour des systèmes réellement très intenses,
on sera obligé de travailler dans le vide, c’est-à-dire de mettre les compresseurs
dans une chambre à vide pour éviter les effets non linéaires dans la propagation
qu’on aurait, avec la propagation, dans l’air, du faisceau lumineux.
Mais, bon, pour un système qui produit des impulsions de un millijoule,
ce type de précautions ne sera pas nécessaire.
Pour l’amplification proprement dite dans le saphir de titane,
il existe plusieurs méthodes.
L’une d’entre elles, est l’amplification multipassage, c’est-à-dire qu’on va
faire passer le faisceau à amplifier plusieurs fois dans le cristal de saphir,
avec un léger angle pour pouvoir à la fin extraire le faisceau qui,
amplifié qui nous intéresse.
Et puis, une autre méthode qui s’appelle, enfin,
qui utilise un amplificateur régénératif, et qui est en
général bien adapté pour des impulsions d’énergie, d’énergie modeste, et qui sera
souvent utilisé comme préamplificateur en amont d’un amplificateur multipassage.
Alors, l’idée est de prendre l’impulsion et de la piéger à
l’intérieur d’une cavité, où elle va faire un grand nombre d’allers-retours et
donc où elle va pouvoir être amplifiée dans un cristal de saphir dopé au titane.
Alors, déjà, comment piéger une impulsion dans une cavité?
Donc, et bien j’ai dessiné ici une cavité.
Vous avez un miroir concave et un miroir plan,
donc ça sera exactement comme, comme une cavité laser.
Il faudra que la cavité soit stable pour que l’impulsion puisse faire un grand
nombre de, de passages dans cette cavité sans que le diamètre du faisceau augmente,
donc, c’est, la raison d’être de miroir concave, pour compenser la diffraction.
Et puis, on va faire rentrer l’impulsion dans cette cavité.
Alors, pour ça, on va utiliser, ici, un élément polarisant, donc là je
l’ai dessiné comme un cube polariseur, mais ça pourrait être n’importe quel type
de polariseur, par exemple une lame, à l’angle de Brewster avec un,
un traitement diélectrique pour que ça fasse office de polariseur.
Et, on va mettre ici, une lame lambda sur quatre.
Donc, une lame lambda sur quatre,
c’est une lame biréfringente, qui induit une différence de chemin optique,
de lambda sur quatre, entre les deux axes de la lame.
Et, je vais supposer que l’impulsion incidente, ici,
a une polarisation verticale, donc perpendiculaire au plan de la figure,
et donc l’impulsion arrive ici sur ce, ce polariseur.
Je suppose que le polariseur est tel que la polarisation verticale va
être réfléchie, alors que la polarisation horizontale serait transmise.
Donc, ici, la polarisation étant verticale, l’impulsion va être
réfléchie et va faire un aller-retour dans la lame biréfringente lambda sur quatre.
Donc, le déphasage dû à la biréfringence de la lame va s’accumuler sur les
deux passages, donc après un aller-retour, vous aurez un déphasage,
enfin une différence de chemin optique entre les deux axes de lambda sur deux,
ce qui correspond à un déphasage de Pi.
Donc, si vous prenez les deux axes de votre lame,
ça veut dire que votre champ électrique, dont on va supposer qu’il est,
polarisé à 45 degrés par rapport à, par rapport à la lame,
et bien vous allez avoir une dépolarisation qui, mettons ne va pas,
ne va pas changer de phase, et l’autre polarisation va subir un déphasage de Pi.
Donc, vous voyez, vous allez avoir une symétrie par rapport à l’axe de la lame,
et vous aurez donc, en fait, tourné la polarisation de 90 degrés.
Donc, après un aller-retour dans cette, dans cette lame,
et bien l’impulsion va être polarisée horizontalement, et donc elle va
être transmise par le polariseur, et donc le faisceau va suivre ce chemin-là.
Ensuite, il va être réfléchi par le miroir concave, revenir sur le polariseur,
être transmis à nouveau, puisque le, le faisceau est polarisé horizontalement.
Il va à nouveau faire un aller-retour dans la lame quart d’onde,
dans la lame lambda sur quatre.
Donc, ça va faire une différence de chemin optique effective de lambda sur deux,
et donc vous allez à nouveau tourner la polarisation.
Donc votre faisceau, en fait, il va, après, après l’aller-retour dans la lame,
il va être de nouveau polarisé verticalement,
et donc il va être réfléchi par le polariseur.
Donc, vous voyez que de cette façon-là, l’impulsion rentre,
fait un aller-retour dans la cavité, et ressort.
Donc, on n’a pas encore réussi à piéger l’impulsion.
Pour ça, on va utiliser un élément électro optique, qu’on appelle une cellule de
Pockels, donc qu’on va insérer ici, dans, dans la cavité.
Et, donc ça utilise l’effet Pockels, dont j’ai déjà parlé.
C’est un effet qui est lié à la,
à la susceptibilité non linéaire du second ordre, khi deux, et qui fait que
l’indice de réfraction du matériau, va dépendre du champ électrique appliqué.
Alors, plus précisément,
on pourra s’arranger pour avoir une biréfringence contrôlée électriquement, et
donc faire en fait une lame biréfringente mais dont le, le, la différence de
chemin optique entre les deux axes va dépendre de la tension appliquée.
Et donc, ce qu’on va faire, c’est qu’on va, en fonction du temps,
appliquer sur la cellule de Pockels, une différence de,
une différence de potentiel, et donc un, un champ électrique statique, celui qui
va contrôler la, la biréfringence dans la lame, qui va, subir une, une différence,
de potentiel rapide, à un instant bien choisi, et donc qui va
faire que tout d’un coup, cette cellule de Pockels qui, initialement, donc, n’avait
pas de tension et donc était neutre, donc c’était comme ci elle n’était pas là.
Une fois qu’on a appliqué ce créneau de tension, et bien la cellule de Pockels va
jouer le rôle d’une lame lambda sur quatre parce qu’on a bien choisi la valeur de
la tension pour que la biréfringence corresponde à une lame lambda sur quatre.
Et donc, ce qu’on va faire, c’est qu’on va laisser rentrer l’impulsion comme on
l’a vu tout à l’heure, alors que la tension est nulle.
Donc, l’impulsion va faire un aller-retour, ici,
donc, lame lambda sur deux et elle va aller tout droit.
Et, au moment où l’impulsion est dans cette zone de la cavité,
c’est là qu’on applique le créneau de tension sur la cellule de Pockels.
Donc, ensuite, quand l’impulsion revient, et bien elle va avoir une, un
déphasage supplémentaire, une différence de chemin optique supplémentaire,
qui sera égale à lambda sur quatre imposée par la cellule de Pockels.
Et donc, quand l’impulsion revient donc, à cet,
à cet instant-là, quand elle traverse la cellule de Pockels à cet instant-là,
et bien on va avoir, une lame lambda sur quatre plus une lame lambda sur quatre,
ce qui fait lambda sur deux, et comme on fait un aller-retour dans le système,
lambda sur deux plus lambda sur deux, ça fait lambda.
Donc, un déphasage de deux Pi entre les deux axes, c’est-à-dire que,
ce système finalement, va être neutre, pour l’impulsion qui sera passée, donc,
à cet instant-là, dans le, dans le système.
Et donc, vous voyez que comme ce système est neutre,
et bien l’impulsion polarisée horizontalement va revenir polarisée
horizontalement, et donc va être maintenant piégée dans la cavité,
et faire un grand nombre d’allers-retours dans cette, dans cette cavité.
Par contre, les impulsions suivantes de l’oscillateur, donc rappelez-vous
que tout ceci va être injecté à l’aide d’un oscillateur femtoseconde,
les impulsions suivantes qui vont arriver polarisées verticalement,
vont faire un aller-retour, ici, dans le système, et donc verront elles-aussi un
effet qui va être, globalement nul, puisqu’on aura un,
une différence de chemin optique de lambda pour ces impulsions aussi.
Et donc, ces impulsions-là vont faire un aller-retour dans le système et être à
nouveau réfléchies, puisque leur polarisation est toujours verticale.
Donc, vous voyez que les impulsions suivantes de l’oscillateur ne
vont pas pouvoir rentrer dans la cavité.
Donc, on aura de cette manière réussi à piéger une seule impulsion,
dans cette cavité régénérative qu’on a ici.
Alors, évidemment, ce qu’on va faire, c’est qu’on va maintenant,
prendre soin de, d’insérer dans la cavité, un, un cristal
de saphir dopé au titane, qui va être, excité par un, par un laser de pompe,
qu’on aura, on aura envoyé l’impulsion du laser de pompe avant de, de commuter, ici,
la cellule de Pockels, donc avant d’injecter l’impulsion dans la cavité.
Et, ce saphir, donc pompé, par le laser de pompe,
va être amplificateur, et à chaque passage dans le cristal,
l’impulsion va être amplifiée d’un facteur typiquement, typiquement trois O quatre.
Et donc, après un nombre de passages, qui va être de l’ordre de dix à 15,
on va pouvoir effectivement avoir,
ce gain d’un facteur 100 000 qu’on, qu’on souhaitait obtenir.
Alors, pour s’en rendre compte, on va mettre ici, une, une photodiode,
qui va collecter une fraction de, de l’énergie qui est contenue dans la cavité.
En effet, ce miroir ici, qui aura une,
une réflectivité de par exemple 99,9 pour cent, et bien va laisser passer, une
petite fraction, un pour 1000 par exemple, de l’énergie contenue dans la cavité,
et donc en mettant, ici, une simple photodiode, on va pouvoir voir,
la construction de l’énergie à l’intérieur de la cavité.
Alors, voilà ce qu’on obtient.
Ca, ça, c’est une photographie, prise sur,
directement sur un oscilloscope de notre, de notre laser au, au laboratoire.
Et on voit effectivement que le, ici, l’énergie des impulsions, va augmenter,
au fur et à mesure qu’on fait plusieurs passages dans le, dans la cavité.
Alors, en fait, là on voit que les dernières impulsions, les, il y aura,
il y aura un grand nombre d’impulsions ici.
Je vous ai dit qu’on avait, une quinzaine de passages dans le,
dans la cavité, mais l’énergie des impulsions, dans,
dans les temps précédents est trop petite pour être détectée par la photodiode.
Mais donc, on voit les dernières impulsions correspondant aux derniers,
aux derniers passages d’amplification, et puis vous voyez qu’à la fin, le,
le, là au début,
on a un gain un qui est effectivement de l’ordre de trois ou quatre.
Mais, à la fin, le gain devient de plus en plus faible.
C’est tout simplement le phénomène de saturation du gain dont je
vous avais parlé.
Ou, une autre façon de l’interpréter, c’est de dire que avec ce,
ce grand nombre de passages dans le cristal de saphir dopé au titane,
et bien on a extrait toute l’énergie qui était disponible, et il n’y a plus de,
on a complètement vidé le, le, l’énergie stockée dans le saphir, et donc on
n’a plus d’inversion de population, et donc ce cristal qui était amplificateur,
va simplement introduire des, des pertes, et c’est pour ça qu’on va avoir ici,
une décroissance exponentielle de, de l’énergie des impulsions,
stockée dans la cavité, enfin de l’impulsion stockée dans la cavité,
qu’on voit donc sur cet oscilloscope.
Alors une chose, oui, que j’ai oublié de préciser, c’est que le, l’échelle ici,
d’un carreau de cet oscilloscope, correspond à un,
un intervalle de temps de 40 nanosecondes.
Donc, vous voyez ici le, les impulsions qui, qui sortent à chaque,
à chaque passage de la cavité de, de l’amplificateur régénératif par
cette fuite ici sur le miroir, le miroir de sortie.